MUSIQUE – Une question qui tombe comme un couperet pourrait trancher une tête ; l’entendre le fait aussitôt s’encastrer le dos dans le mur ; ça ne sonne pas comme un reproche, mais pourtant ; pourtant, Carbone l'aperçoit comme tel ; parce qu’il se déteste d’avoir agi de cette façon. Aussitôt pensé, aussitôt comprimé, il appuie sur son bras Carbone, pour se remémorer sa bêtise, à l’endroit où la plaie est encore fraîche. Son regard virevolte à sa jambe droite qu’il a poignardée, à son cœur qu’il n’a pas su réellement frapper. Les cicatrices sont là, son corps en est jonché, mais jamais il ne s’était infligé de lui-même de tels sévices ; tout ça par amour. Ressentir la douleur de son corps pour oublier celle de l’âme ; c’était risible et dramatique ; à s’en fendre le crâne. Ses yeux tressautent et il ne répond pas réellement, seulement par un hochement de la tête positif.

Oui.
Oui, je me suis fait du mal.
Oui, ça m’a flingué de ne voir que ton dos à ton départ.
Oui, ça m’a anéanti que tu te barres.
Oui, j’voulais que tu restes.
Je ne voulais pas que tu m’abandonnes, je ne veux toujours pas que tu m’laisses…

Il aimerait pouvoir te hurler tout ça, il aimerait pouvoir dire ce qu’il ressent, mais quelque chose l’en empêche, le maintien au sol ; la peur que tu changes d’avis, que tes doutes reviennent, que tout redeviennent des certitudes. Ou pire, que t’avais raison sur toute la ligne. Et ça tourne en boucle comme un ouragan au-dessus d’une plaine, dans sa caboche y’a rien qui fonctionne comme il le faudrait ; il pleure, mais se force au calme ; il essaye. Carbone ne peut pas être responsable, il ne peut pas être coupable ; mais il a peut-être fauté quelque part… Le problème, c’est qu’il ne sait pas, encore et toujours ; il ne sait toujours pas.

C’est aussi une des raisons qui l'a poussé à s’faire du mal, à s’auto-détruire, pour enfin se ramener à la raison, refaire fonctionner à cette partie de son cerveau qui déraisonne, celle de la mémoire. Rien ne marche. Cette phrase que t’as dite le jour de vos retrouvailles improvisées par l’alcool, il ne pourra jamais l’oublier ; pourquoi ? Pourquoi quand ça vient de toi, tout s’imbrique ? Tout est limpide ? Pourquoi il n’oublie rien quand c’est toi ? Un nouveau hochement de tête, oui, il s’est fait du mal, et s’en fera sans doute encore, malgré lui, pour pallier ton absence.

Mais quand vos regards se croisent de nouveau, après sa demande égoïste ; il y a un battement qui se perd ; comme un cœur qui s’arrête. Il ne le sent plus réellement tambouriner. Et quand enfin, tu t’approches et que tu l'enserres, qu’il retrouve la chaleur et le goût de tes lèvres, alors il sait de nouveau Carbone, ce que c’est que de retrouver son oxygène. Les larmes se mélangent à vos baisers désespérés, mais il s’empêche de t’étreindre, par peur que tu ne sois qu’une illusion qui s’évapore à son toucher. Quand pourtant, tu viens lui demander de te toucher, de t’enlacer, son cœur s’enflamme, ses paupières se ferment, tentant d’emprisonner les perles salées dont le flot commence enfin à se tarir. T’es… Vraiment sérieux… ? Comment y croire ? Après deux ans de tourments…

Il ne pense pas que tu sois doué pour mentir, pas comme lui qui a du cacher au reste des Wild sa condition d’amnésique. Il sait cacher ses sentiments, mais il les subit sans ménagement. J’ai… J’ai peur Hysteria. J’ai peur de… De tellement de choses. Peur de te perdre. Peur que ça soit qu’un rêve. Peur de ne pas être à la hauteur. Peur que tu ne m’aimes pas avec la même intensité. Le regard est détourné et lorsque son avant-bras se pose sur ton épaule, c’est avec difficulté qu’il dissimule une expression de douleur ; la plaie le lance. Sa main métallique se glisse à l’arrière de ta nuque, son front se posant contre le tien, ses yeux perçant cachés derrière le rideau de ses paupières. J’veux pas te dire adieu. J’veux pas avoir à te dire au revoir. Parce que j’sais maintenant ce que ça m’fait de te voir partir. Chaque plaie le lance, chaque plaie est l’écho de sa douleur, de son amour. Je sais que ça me crève.

Les yeux sont de nouveau ouverts, toute trace humide émanant de ses iris a disparu, seule la conviction de ses sentiments le porte ; c’est avec fureur qu’il reprend possession de tes lèvres Carbone, qu’il s’agrippe à toi, encore, comme s’il était l’ancre et que t’étais son port, son havre de paix. Je t’aime putain… Je t’aime tellement que ça me tue… Et je suis désolé. Désolé de… De m’être blessé. De ne pas avoir su nous préserver… D’avoir oublié. J’ai oublié tant de choses, mais je t’ai jamais oublié, toi. Y’a pas plus vrai que ça.

Pardonne-lui d’avoir tout détruit, tout anéantis ; car tu n'es pas le seul responsable Hysteria. Il aurait dû te garder près de vous, près de lui.

// c'est l'amour destructeur, qui déchire le cœur ♡