Il s’était levé car il n’arrivait pas à trouver le sommeil. En même temps, comment était-ce possible alors qu’il se trouve sur leurs terres ? Alors qu’à tout moment l’un d’eux peut croiser son chemin. Tout ce qu’il veut c’est tous les tuer.

Erre sans but dans cette forêt de sang, les poings serrés, la tête baissée. Tout ici lui rappelle un enfer bien trop réel. Un passé qui l’a à jamais marqué. Seven, Thirteen, Kairos… Ses parents. Combien de fois avait-il fui leurs maltraitantes à son égard en se perdant dans cette forêt maudite ? Il ne sait pas. Bien trop de fois. Un gamin faible et désabusé, ne sachant quoi faire d’autre que fuir les autres car il ne peut pas se fuir lui même. Oh il le ferait si c’était possible. Qui voudrait rester près d’un monstre ?

Mais soudain il entend des bruits. Serre les dents, tous ses muscles se tendent. Un animal..? Un vigilante. Ça ne peut pas être autre chose. Il prie pour ne pas croiser le chemin de l’un de ces traîtres hypocrites sous peine de voir sa rage exploser. Et de le tuer. Car il est instable Thanatos. Surtout au vu des événements récents. Arraché à cette famille qui l’a accepté pour retourner dans l’enfer dans lequel il a vu le jour. Il voudrait tout détruire.

Et c’est là qu'il la voit foncer droit sur lui. La surprise éclaire son visage. Calypso..? Encore elle ? Et elle remet tout en question, toute sa haine, toute sa rage. Parce qu’il n’aurait pas le réflexe de vouloir la tuer elle. Pas vrai ? Mais elle ne s’arrête pas, ne semble pas l’avoir vu. Et lui ne dira rien jusqu’à ce qu’elle le percute et le fasse tomber, finissant sur lui.

Désorienté, il tente de reprendre ses esprits alors qu’elle crie son nom. Elle s’en rappelle ? Mais comment oublier un meurtrier. Et il réalise la position dans laquelle ils se trouvent. Le rouge lui monte alors très rapidement aux joues et il tourne la tête, cachant son visage d’une main pour ne pas la regarder. Sa mâchoire est tendue et il n’ose pas bouger. Autour de son autre main qui touche le sol, de légères fissures apparaissent dans la terre. Il n’a même pas le courage de parler.

Elle ne bouge pas.
Pourquoi elle ne bouge pas ?!
C’est la panique dans la tête de notre Major déchu.

Elle… me cherchait..?
Il ne comprend vraiment pas pourquoi. Alors qu’il l’avait quasiment étranglé, alors qu’il avait été violent avec elle, alors qu’il avait frappé cet animal insignifiant pour lui mais qui semblait si important pour elle.

Lui ne remarque même pas le sourire qui illumine son visage car il cache toujours le sien, cherchant désespérément à regarder ailleurs, à faire abstraction de sa présence sur lui. Ses joues ne peuvent pas être plus rouges qu’en cet instant et chaque mouvement qu’elle fait le fait grimacer.
Et elle se frotte soudain à lui, lui arrachant un gémissement, fissurant le sol.
Va-t-en, je t’en prie.
Il ne peut même pas la pousser. Il ne peut même pas la toucher. Parce qu’il ne veut pas lui faire mal. Parce qu’il ne peut pas se contrôler.

Est ce… Qu’il va bien..?
Non.
Certainement pas.
A cause de tout ce qui lui arrive, à cause de sa présence ici, à cause de cette solitude encore plus présente, de cette haine qui le ronge.
Mais la, tout de suite, ce qui le dérange, c’est la position dans laquelle ils se trouvent.
Serre un peu plus les dents.
Pourquoi tu restes la ?!
MALADE ? Non.
Il veut juste qu’elle descende… Parce que ça lui fait perdre la tête. Et il comprend pas pourquoi.

Puis il l’entend sortir quelque chose de son sac, elle change de sujet.
A boire ? Faire la fête ? Mais… Pourquoi voudrait-elle faire la fête avec lui ? C’est un ennemi. Un meurtrier. Un monstre. Décidément il ne comprend vraiment pas cette femme.
Mais il faut vraiment qu’elle s’en aille. Qu’elle se pousse.
Une inspiration pour tenter de parler.

- …Calypso…

Pousse toi, je t’en supplie.
Ses doigts s'enfoncent dans la terre meuble de la forêt tandis que les fissures ne semblent pas vouloir arrêter de s’agrandir.

Et en parlant de cette créature, il l’entend feuler à côté de lui. Tu n’as qu’à lui dire de bouger sale bête ! Calypso ne reste pas là, laisse moi respirer. Parce qu’il étouffe Thanatos. Sa respiration accélère, il peine à trouver son air.

Mais elle ne compte visiblement pas lui donner l'occasion de reprendre son souffle. Ses mains se posent sur son torse et c’est un soupir qui lui échappe. Pourquoi est-ce qu'elle le touche comme ça ?

Calypso.
Le problème n’est pas là et elle ne semble absolument pas s’en rendre compte. Il sait bien qu’il ne risque rien avec elle. Cette femme est bizarre et refuse d’avoir peur de lui. Mais la c’est bel et bien lui qui se retrouve pris au piège alors qu’elle resserre un peu plus ses cuisses contre lui, lui arrachant un grognement alors que tous ses muscles se tendent.

Puis c’est un frisson qui parcourt son corps lorsque ses doigts glissent sur son bras, l’empêchant de cacher son visage par la même occasion. Mais il ne la regarde toujours pas, il ne peut pas. Quelques-unes de ses mèches couleur de neige recouvrent ses yeux et c’est pour le mieux. Pourquoi est-elle si douce ?

Et ces mots…
Si tu savais Claypso. A quel point il l’est. Seul.
Il tourne finalement lentement la tête vers lui, plonge ses rubis dans le gris des ses yeux. Surpris et perdu.
Pourquoi cherche t elle à l'aider ? Pourquoi cherche t elle sa présence ?

Arrête.
Cesse de me toucher.
Ne se rend elle pas compte de ce qu’elle fait ? Alors même que le sol autour d’eux se fissure sous sa main.
Et il essaye de se contenir, de garder le contrôle, pour ne pas se laisser submerger par cette douceur si inhabituelle.
Est-ce de l’affection ?
Serre une dernière fois la terre avant de réussir à retirer sa main du sol, haletant.

- Calypso… Pourquoi..? Je…

Il ne parvient même pas à aligner deux mots, tout se mélange dans son esprit.
Pourquoi ne peut-il pas simplement lui dire de se pousser ? Pourquoi ne peut-il pas simplement la pousser lui-même ?
Approche ses mains de sa taille, sans jamais la toucher. Il peut pas faire ça Thanatos. Pas dans cet état. Parce qu’il la blessera, c’est certain.

Et son visage change, elle semble enfin comprendre le problème… Mais la tristesse s’affiche sur ce dernier et sa mâchoire se tend encore davantage alors qu’il éloigne ses mains, en pose une sur son visage, le dissimulant à nouveau, le rouge sur ses joues ne s’étant toujours pas dissipé.

Il ne dit rien, ne répond, serre ce poing contre le sol, évitant de poser sa main à plat sur le sol, ne créant maintenant que de très fines fissures sur le sol.
Pour ne pas faire trop de dégâts.
Il la sent prendre appuie sur son torse, pour se lever ? Ses mouvements lui arrachent un nouveau grognement. Pourquoi est-ce si… étrange ?
Mais elle ne bouge pas, il la sent toujours contre lui et il serre les dents.
Puis ses doigts se resserrent contre sa poitrine. Il comprend pas. Il comprend rien.
Qu’est ce qu’elle a ?
Il retire sa main de son visage pour pouvoir la regarder, les joues toujours roses, le souffle court.
Elle semble… triste..?

La jeune femme change de sujet et il abandonne.
Accepte sa présence parce qu’il ne peut rien y faire, ça lui tourne trop la tête.
Il a trop chaud.
Et il ne veut pas manger.
Même s’il mange très peu dernièrement.
On peut dire que son mal-être suffit à le nourrir.
Alors il secoue doucement la tête de gauche à droite en guise de réponse.

Ça le dérange, ce qu’il entend.
Parce que ça résonne dans sa tête, fait écho dans sa poitrine.
Elle non plus ne voudrait pas exister ?

- Pourquoi… Tu t’excuses..?

Toujours difficile de parler.
Toujours difficile de faire abstraction de sa présence sur lui, d’oublier ces sensations bien trop étranges qui inondent son corps.
Mais elle avait piqué sa curiosité…

Puis la bestiole s’y met, grimpe sur lui pour se blottir contre elle, le faisant grimacer par la même occasion.
Elle n'est jamais seule elle…

Il la regarde, assiste au retour de ce sourire qui caractérise si bien son visage. La dernière fois aussi, elle n’arrêtait pas de sourire…
Pourtant il le voit bien, qu’elle souffre, qu’elle pleure.
Et il ne comprend pas son chagrin.
Puis elle prend la parole et il l’écoute, curieux, pendu à ses lèvres.

Et ce qu’elle dit marque son visage de surprise.
Si elle n’est pas gentille, qui le sera..?
Encore de la pitié.
Il en a assez de cette pitié.
Cette chose qu’il exècre lui serre le cœur un instant mais elle se reprend soudainement.

Néanmoins, ce qui lui fait oublier ses dires, ce n’est pas cette dernière phrase, mais bien son mouvement de bassin contre le sien.
Pose immédiatement sa main sur sa bouche en réflexe, étouffant un gémissement entre ses doigts, tandis que son autre main se pose un très court instant sur sa taille avant qu’il ne la retire aussitôt en se rendant compte qu’il venait de la toucher.
Le visage rouge, la respiration saccadée, il tente de reprendre son souffle.
Alors il l’écoute parler, sans rien dire.

Et ses mots le touchent.
Parce qu’elle voit juste, il ne se supporte pas, il se dégoûte, il se répugne.
Puis elle pose à nouveau ses mains sur son torse et il serre les dents.
Elle le touche encore, il en peut plus.
Sa poitrine se gonfle profondément sous ses doigts alors qu’il tente désespérément de respirer.

Il… Est magnifique et mérite d’être aimé..?
Elle ment.
Tout ça,  il n’y croit pas un seul instant. Pourquoi tu dis ça Calypso ? Pourquoi ?!
Mais les paroles qui suivent lui font ouvrir les yeux plus grand.
Son… Amour ?
Elle… L’aimera toujours..?
Mais…
Elle ne sait rien de lui.
C’est juste un meurtrier, un ennemi, un homme violent qui a failli lui ôter la vie alors… Pourquoi ?

- Tu…

M’aimes..?
Il ne sait même pas quoi répondre à ça, elle l’a complètement perdu.
Et elle ne s’arrête pas là, s’excuse de… QUOI ?
Elle voudrait… Elle voudrait l’embrasser ?
Comme…
Alors même qu’il pensait ne pas pouvoir avoir plus chaud, une bouffée de chaleur traverse son corps et ses joues rougissent encore davantage alors que son indexe passe sur sa lèvre, se demandant ce que ça ferait.
De l’embrasser.

Puis ses mains se glissent sur ses hanches, remontent le long de son torse pour finir dans sa nuque, lui provoquant un violent frisson, lui arrachant un soupir, accélérant un peu plus sa respiration.
C’est quoi cette sensation ?
Pourquoi il peut plus respirer ?
Son autre main qui s’était reposée sur le sol recommence à le fissurer.
C’est décidément bien trop pour lui…
Il resserre à nouveau son poing pour limiter les dégâts.
Mais il ne veut pas qu’elle s’excuse. Vraiment. Il ne sait pas pourquoi mais il ne veut pas.
Inspire profondément.

- Ne… Expire, inspire à nouveau. T’excuses pas…

Parce que personne ne lui a jamais dit ça.
Parce que même si ces mots sortent de la bouche d’une Vigilante, ils ont su toucher les ruines de son cœur brisé.
Et même s’il n’y croit pas entièrement… Un doute s’installe dans son esprit et c’est amplement plus que tout au long de sa vie.
Nettement plus que rien.

Un silence complet, seulement comblé par les bruits de sa respiration, alors qu’ils se regardent, les joues aussi rouges l’un que l’autre.
Elle semble vouloir dire quelque chose mais aucun son ne sort de sa bouche.

Mais elle se plaque soudainement contre lui et lui arrache un nouveau gémissement qu’il tente de contenir, une fois de plus, entre ses doigts.
Sa poitrine se soulève à un rythme effréné sous la sienne, il en peut plus Thanatos.
Pourquoi elle continue de se coller à lui ?

- …Calypso…

Mais heureusement il entend un nouveau bruit dans les broussailles et il tente de faire abstraction de la jeune femme pour balayer les alentours de ses yeux, à la recherche d’un potentiel danger.
Ça fait un moment qu’il erre dans cette forêt et il sait ce qui peut y rôder dans l’obscurité.
Et c’est là qu'il le voit.
Le léopard rouge qui les a pris pour cible.

- Il… Faut que tu… Te pousses…

Il réussit enfin à le lui dire grâce au danger qui les guette.
Mais elle est pas assez rapide, il faut qu’il la touche, il n'a pas le choix.
Alors il prend une grande inspiration et se redresse soudainement dans un grognement qu’il ne parvient pas à contenir. L’air lui manque mais il va falloir qu’il se fasse violence.

- Il y a… Un léopard…

Léopard qui, bien évidemment, n’attend pas qu’il se décide à se lever avant de bondir en leur direction.
Prend son courage à deux mains, faisant tout ce qu’il peut pour garder le contrôle et ne pas lui faire mal lorsqu’il pose ses mains sur ses épaules pour la pousser sur le côté avant que la bête ne l’atteigne.
Ses griffes se plantent dans son épaule mais il ne faudra qu’un instant pour réduire la créature en miettes.

Il se relève ensuite, sans faire attention à l'état de son épaule, pour s’approcher de Calypso.
Il était inquiet, il avait peur de ne pas avoir su se contrôler.

- Tu… Tu vas bien..?

Elle avait crié son nom, comme si elle s’inquiétait de son sort.
Blessé ?
Maintenant qu’elle le dit, il peut sentir que son épaule le lance oui… Tourne la tête vers cette dernière pour voir son sang couler. Il s’était déjà infligé bien pire seul, alors ce n’est pas ça qui allait l’inquiéter.

- C’est rien.

Et il le pensait sincèrement.
Mais elle s’excuse encore et encore. Pourquoi pense t elle que c’est de sa faute ? Comment aurait-elle pu prévoir ça ? Il comprend pas Thanatos.

Puis il tourne à nouveau la tête dans sa direction, leurs regards se rencontrent, leurs souffles se mêlent et il rougit de plus belle, tétanisé par cette proximité.

Elle lui dit aller bien, lui montre ses épaules et… Il ne peut s’empêcher d’être soulagé. Parce que c’est son pire cauchemar. Perdre le contrôle, détruire quelqu’un, effacer son existence sans le vouloir.
Comme il l’avait déjà fait.

Mais sa main se pose sur sa joue et leur couloir pivoine s’accentue encore.
Cesse d’être si douce… Il ne le comprend pas, ne sait pas comment l’appréhender, ne sait pas comment réagir.
Ça le perd.
Et comment ? Comment peut-elle être aussi certaine que jamais il ne lui fera de mal ? Même lui n’en est pas certain.
Alors comment ?

Elle le coupe assez rapidement dans ses réflexions lorsque son pouce caresse sa peau avec douceur. Et il ne cesse de rougir, il perd à nouveau son souffle, elle lui subtilise son air, l'empêche de respirer.
Il serre la mâchoire pour tenter d’encaisser sa douceur, de ne pas craquer sous ces sensations étranges.

Mais alors qu’il faisait déjà de son mieux, elle rapproche son visage du sien. Sa respiration accélère alors que ses rubis sont plongés dans le gris de ses mires, dans l’attente de son prochain mouvement, gelé par tout ce qu’il ressent.
Et c’est un baiser qu’elle dépose sur sa joue alors que sa respiration se coupe. Elle se coupe avant de reprendre en accélérant alors qu’il passe ses doigts sur sa joue, incrédule, désorienté.

Lorsqu’elle recule, il fixe ses lèvres, sans s’en rendre compte. Il les regarde bouger alors qu’elle le remercie pour ce qu’il a fait.
Mais il refuse de passer pour un sauveur, ce n’est pas ce qu’il est.

- Je… Ne suis pas un sauveur…

Des mots qu’il sort quasi machinalement, trop habitué à ce discours, trop habitué à se voir comme rien d’autre qu’un monstre cruel, dénué de cœur.