S’il te faut mon temps.
Chaîne aux pieds.
Pour que tu te sentes en sûreté.
Alors laisse-moi m'y attacher.La liberté a un goût que l’on n’oublie jamais. Peu importe les années qui sont passées. Peu importe les décennies à venir. Il n’y a que ceux qui s’en savent privés qui peuvent jouir de cet instant ultime de retrouver la terre. Le soleil. Les odeurs. Le toucher. Les voix. Les rires. Le plaisir de la vue et surtout ; la vie. Et il t’arrive parfois d’y songer, Tyr. A ce moment précis où tu as enfin sorti la tête de la pénombre pour retrouver l’ardente lumière. Celle qui aurait été capable de crever tes yeux tant elle te semblait puissante. Dix longues années ne pourront jamais être remplacées et tu le sais alors tu as vécu. Comme tu n’as jamais pu le faire, mais qui aurait cru.
Qui aurait cru que tu serais là aujourd’hui.
Une nouvelle fois enchaîné et que tu ne dirais rien. Deux raisons à cela subsistent à présent alors que le silence règne. La première est Quixote elle-même. Ce duel, tu t’y attendais en arrivant à n’en point douter, tu savais qu’il te serait difficile de rester libre sur ces terres. Et tu savais que la jeune femme avait grandi, elle aussi. Son poste de reine devait être assuré et préservé. Il lui était impensable de laisser un condamné à la perpétuité se promener sans ses geôliers. Peut-être que la victoire n’était pas impensable et peut-être que cela aurait changé bien des choses à ce présent, mais il t’était hors de question de soumettre le pion le plus gradé. Hors de question de prendre le risque de la détrôner à un profit dont tu ne voulais sûrement pas.
Car l’enfant formé à être Roi.
S’est détourné de cet avenir il y a bien longtemps.
La seconde. Ah la seconde est une affection dont il est difficile de se passer. A vrai dire, si cette personne savait à quel point elle t'avait manqué. Si cette personne pouvait comprendre à quel point tu aurais voulu être là. Chaque jour. Chaque heure. Chaque minute. A ses côtés dans l’espoir de lui tendre encore la main quand elle-même a brisé le cycle si sombre de la solitude entre ces murs. Si elle savait, cette personne, comme tu tiens à elle, mais comme il lui fut déchirant de te laisser partir et la bête s’en souvient bien. Parce que tu n’es pas dupe, Tyr et tu le savais parfaitement que Séraphin était anéantis de te voir t’en aller. De te voir retrouver une liberté qui ne pouvait plus lui permettre de te retrouver à chaque fois que son cœur était meurtri.
Tu le savais,
mais tu es parti.Parce que vivre chez les Legendary n’était plus une option. Ce n’était plus une possibilité ni pour toi, ni pour la personne qui gouvernait. Comment aurais-tu pu errer en ces lieux sereinement. Comment aurais-tu simplement pu avoir coeur à y rester sans étouffer.
Tyr ne pouvait pas rester, Séra.
Mais si tu savais comme tu lui as manqué.
C’est pour cela que tu te tiens là à présent. Le regard fixé au sol, attendant que sa présence vienne inonder ces dalles et cette froideur. Alors que tu te remémores vos retrouvailles et ses larmes. Qu’au fond, il y a l’immense sentiment familial et possessif qui bourdonne en écho à cette étreinte qu’iel t’a offert. La seule personne heureuse de revoir tes traits et te savoir en vie. Il n’y avait que pour iel que tu pouvais accepter de retourner ici afin de lui rendre l’endroit qu’iel chérissait tant.
Parce que c’est plus fort que toi, Tyr.
Même si la mort devait venir.
Même si la torture devait vivre.
Même si le sol devait être ta seule nourriture.
Tu serais venue ici de toi-même pour lui rendre un semblant de bonheur éphémère.