J’ignore l’histoire de mes parents et la manière dont ils se sont rencontrés. Tout ce que je sais, c’est que lui était vigilante et qu'elle était trapper. Elle a tout abandonné pour lui, par amour et m’a donné naissance.
De mon enfance, je n’ai pas grand chose à raconter. J’avais la même vie que tout enfant du village, mais je crois qu’à l’époque, j’aimais bien mon pouvoir. C’était amusant tant que ce que je voyais restait inoffensif. Car je me souviendrai toujours de ce jour de mes 8 ans où j’ai touché l’arme de mon père. Les images avaient afflué en moi, me montrant ce que je n’étais pas encore prêt à voir.

Elle vise et plonge, écorchant les chairs et se recouvrant légèrement de rouge. Retirée, l'assaut est relancé après une parade. Mieux ajustée, la frappe pénètre le corps, s'enfonçant dans les entrailles adverses. Le râle de la victime est couplé au son des tissus qui cède sous la lame et du sang qui afflue de la blessure.

Le lecture de cette arme qui se battait, de mon père en combat sanglant, la violence des images non contenue, le fait d’être plongé sans avertissement dans l’horreur de ce qu’était pourtant la réalité, mais sous une vue différente de ce qu’on peut voir en tant normal…
Mon visage était devenu livide. L’arme avait été lâchée. Mon estomac s’était retourné et déversé. Et mes larmes coulaient sur mes joues.
D’autres diront que cela allait me préparer à mon avenir… Malheureusement, je n’étais pas taillé pour devenir un soldat quel qu'il soit. Entre ma petite taille, déjà à cet âge-là, et mon manque de force, je n’avais aucune chance. Si au moins j’avais eu un pouvoir utile… Mais non.  

J’ai donc compris assez jeune que notre monde était cruel et que nous en vivions pour gagner, pour manger, pour survivre tout simplement.
Mon père étant un chasseur pour les H-S, il s’en allait fréquemment. Ma mère m’a alors appris qu’il y avait d’autres moyens pour survivre que la force. C’est aussi d’elle que je tiens mon amour pour l’envie d’écrire, bien que ce ne soit rien de très élaboré.

J’ai décidé de quitter le village vers mes 13 ans. Au QG des vigilante, je suis devenu l’assistant de l’agent médical. Je voyais un moyen d’être utile par le biais de ce poste. Tout se passait bien. Et vous savez très certainement que lorsque tout se passe bien, un grand malheur arrive juste après. C’est exactement ce qui est arrivé, car l’année suivante, à la fin d’un H-S, on est venu me rapporter que mon père était mort. J’ai refusé d’y croire.
La première phase du deuil : le déni.
Puis je me suis tourné vers mon supérieur, lui demandant l’utilisation de la capsule. Mais c’était bien trop tard.
Les émotions étaient nombreuses. La colère, l’incompréhension, la tristesse, l’espoir brisé, la souffrance. Ce n’était que seul que je m’étais permis de tout laisser éclater.
Il m’a fallu plusieurs mois pour l'accepter. En revanche, il n’est toujours pas question d’accepter sa perte sans compensation, même si cela vient à prendre des années.

Si j’ai réussi à surmonter la perte d’un père, il n’en est pas forcément de même pour ma mère. Elle a perdu l’amour de sa vie ce jour-là. Je lui rendais visite régulièrement et, à chaque fois, je voyais son état se dégrader. Comme un inséparable qui perd sa moitié, elle s’est laissée dépérir sans que je ne puisse faire quoi que ce soit pour elle. Je suis devenu orphelin pour la seconde fois à mes 17 ans et ce n’était pas plus agréable que la première fois.

Mettant des pansements sur les fissures de mon cœur, je continuais de vivre et de grandir. Je finis par devenir agent médical, donnant tout ce que je peux pour ne pas avoir une vie qui disparaît entre mes doigts.

Il y aurait d’autres histoires à vous donner, mais je doute que mes déboires amoureux ou le récit des objets que je trouvais intéressant vous captivent et vous passionnent réellement…