Zarina se souvient toujours.
Murk ne sait plus.
Zarina était rongée par la vie.
Murk a tout oublié.
Mais Murk est rongé par sa seule existence.
Pourquoi ?
Tu as laissé ce monde se détruire.
Tu as abandonné cette maison en ruine.
Tu as brisé les mille et une promesses faite à sa fille.
Tout est si vide.
Si terne.
Si pathétique.Les photos glissent le long des murs. S'écroulent au sol. Fracassent le verre en mille miettes d'étoiles. On dirait des étoiles. Étalées sur le sol. Abandonnées. Déchues du royaume des cieux. Vide du passé. Interdites de retourner chez elles. De rentrer. D'un œil fade, tu observes les myriades de lumières qui se reflètent dans le verre brisé. Tu n'écoutes plus ses gémissements. Tu n'entends plus sa voix désespérée. Tu n'as plus la force de la regarder. Cette mère devenue un déchet. Elle a tout perdue, qu'elle te dit si souvent.
Regarde-moi, je suis juste devant toi. C'est ce que tu aimerais dire, crier, hurler à en perdre haleine, mais c'est si vain.
V a i n. Tu as vu le néant dans ses yeux. La folie qui ronge. La tristesse qui dévore. Elle a perdu l'homme de sa vie. Tu as perdu le seul père de ta vie. Le seul repère clair dans cette existence sombre. Le monde s'est noirci aujourd'hui. Petit à petit. Il était si clair dans le temps. Si beau. Si illuminée. À présent, il ne reste rien. Rien de plus que les bouteilles vides qui roulent sur le sol et ce déchet. Incapable de tenir debout. Proche du coma à chaque instant. Dépendante. Un fardeau.
« Maman, je suis là. » que tu as dit un jour et tu le regrettes encore à ce jour. Son regard dément. Son esprit troublé. Son monde écroulé. Tu n'étais pas assez pour la sauver. Elle n'a rien dit. Elle a seulement observé, mais tu as senti. Le long frisson glacé qui remontait le long de ton échine un peu voûtée. La jeune ado un peu repliée sur elle d'avoir subi la perte d'un parent. À cet instant, tu as compris. Compris que dans sa vie, tu n'étais définitivement pas assez pour la relever. Pour devenir la force qui lui manquait tellement.
« Ils laissent mourir les soldats à leur place ! Je suis certaine qu'ils sont responsables de ça ! » la guerre ne fait jamais de cadeau. Jamais. Le hasard décide seulement. Il décide si la bombe explose une seconde avant ou une seconde après. Il décide si la roquette frôle ou explose. Il décide si les soldats rentrent ou s'ils ne reviennent jamais en entier.
Asphyxie.
J'étouffe de te regarder.
J'agonise de devoir vivre à tes côtés.
J'étrangle à penser à ce jour où je devrais te revoir.
Te revoir encore une fois mais pour quoi faire ?
Dans tes yeux vides, je n'existe pas.Égoïsme. Faiblesse.
H u m a i n e. Ce n'est pas de la rancœur. Ce n'est pas de la haine. C'est de la peine. Au fond de toi, c'est ce en quoi tu crois. C'est ce qui se répète chaque fois que le soleil se lève une nouvelle fois. Comme pour ne pas sombrer. Sombrer dans les plus mauvais côtés de la personnalité. Pour ne pas ruminer à vie une haine vaine. Si difficile. Chaque parcelle des souvenirs ronge, dévore, déchirent. Tu crèves.
C r è v e s d'avoir tout perdu en un claquement de doigt. D'avoir dû quitter cette maison. Cette maison ou ses souvenirs demeurent encore. Les souvenirs heureux. Les souvenirs d'un père qui passe une main dans tes cheveux. Il n'était pas souvent là, si souvent parti à l'étranger, en mission. Cependant, son absence bien que pesante, était comblée par son seul sourire. Ce sourire unique qui ne s'adressait qu'à toi. Il en avait un pour ta mère évidemment, mais celui-ci. N'était-il pas le plus beau d'entre tous ? Tu es ce qu'il désirait le plus protéger, sauver. Zarina, son seul enfant. Sa seule fille.
« Ma mère est enfermée à l'asile. » que tu lances simplement à un ami. Depuis des années tu traînes ici. Dans les rues non pas malfamées, mais un peu oubliées de cette ville. New York est grand. New York est un peu hors du temps. Décalé. Ici, tu as simplement trouvé un endroit où rester brièvement. Alors au-dessus du salon où tu exerces ton métier, tu erres dans un petit appartement. Et tu dessines pour les enfants. Innocence. Fragilité. Cruauté. Les enfants sont tout ceci. Et quelque part tu cherches à en sauver. À aider ceux qui se sentent seuls comme tu l'as été. Derrière cette apparence sombre aux yeux de certains, du bout des doigts tu dessines les couleurs de l'arc-en-ciel sur du papier.
Je meurs.
À petit feu, je disparais.
Alors je consomme pour oublier.
Un joint à la main, j'ai l'impression de voler.
C'est éphémère, stupide peut-être, mais seule, j'erre.
J'erre librement sans revoir son visage détruit.
Son si beau visage resté en pleurs.Ils pouvaient t'aider. Du haut de tes quinze ans, tu te souviens du jour où ils sont venu l'annoncer. La mort du lieutenant Wright. Ta mère aurait pu essayer de se sauver de la souffrance. Si seulement elle avait attrapé la main qui se tendait sous ses yeux. Celle que tu lui offrais avec tant d'ardeur. Parce que toi aussi, Zarina, tu avais besoin de quelqu'un. Pour surmonter la perte. La peur et la douleur. Tu avais besoin de la chaleur de ta mère. De celle qui t'as élevé. Qui t'as aimé. Qui t'as si lâchement abandonné.
C'est ce jour-là que tu as remarqué. En laissant cette main dans le vide, inerte. Tu as senti un picotement. Bref et lancinant. Sans comprendre ce qu'il en était. Il est revenu cependant. Un peu plus chaque jour après avoir eu ce vaccin contre ce virus du nom de COVID. Celui qui terrorisait ce monde. Comme tu avais trois ans à l'époque de son apogée, tu n'avais pas hérité du vaccin, ton père ayant peur des résultats. Alors c'est bien des années plus tard que tu l'as eu. Par mégarde. Et les mains sur tes crayons de couleur, tu prétextais que ce n'était rien. Tout comme tes yeux éclairci que tu as caché avec des lentilles. Rien de plus qu'une sensation bien vague dans un monde déjà dévasté. Alors tu l'as ignoré. Longtemps. Longuement. Jusqu'à la voir partir, te quitter. Jusqu'à prendre la route jusqu'à cette grande ville. Jusqu'à trouver quelqu'un à qui te raccrocher enfin. Une femme. Dans tes yeux, elle était si belle. Tu n'as jamais eu le temps de donner un nom à ce sentiment.
Qu'il lui manquait déjà un fragment.
Au simple toucher de ta main, un beau matin.
Elle est partie en fumée.
Crachant du sang sur les draps.
Elle t'as quitté du jour au lendemain.
Les jours sont devenu de longues agonies, tu as fumé de plus en plus pour l'effacer. Espérer que ce souvenir disparaisse. Que ce picotement s'évapore. Ce n'était pas de ta faute. Ce n'est pas toi. En aucune façon, ça ne peut l'être. Tu ne le supporterais pas, Zarina. Elle était malade. En phase terminale de quelque chose. C'est obligé, n'est-ce pas. Ce n'est pas toi. C'est impossible. Tu as trop de problèmes. Trop de poids sur les épaules.
Je ne veux pas être folle. Que tu songes en ressentant encore cette chose.
Qui erre au bout de tes doigts.
Tu t'observes devant ton miroir. Les traits faciaux se crispent. Tu déglutis lentement, Zarina. Et finalement tu touches ton miroir. Entendant un fracas près de ta porte d'entrée. Des hommes par dizaine qui s'engouffre dans cet appartement miteux. T'embarquant dans un endroit bien étrange où les souvenirs se sont dissipés. Ils ont tout effacés avant de t'y envoyer.
La lumière.
Le néant.
Tu clignes des yeux.
Ce monde est différent.
Sakhaline qu'il se nomme.
Les souvenirs sont flous.
Un mal de crâne perle avec virulence.
Tu croises un inconnu qui vient te tendre la main.
Tu viens la frôler pour te relever.
Tu lui nécroses un doigt.
(D o u l e u r.)
(R e m o r d s.)
(R e g r e t s.)
(S o u f f r a n c e.)
(S o l i t u d e.)
Zarina n'est plus.
Il ne reste plus que Murk.
Les jours se ressemblent en ces lieux. Sakhaline te semble presque familière. Comme si tu vivais ici depuis toujours. Sans comprendre ce malaise au fond des tripes. Que quelque chose ne colle pas, mais que ton inconscient n'arrive pas à déterminer. Tu ne sais plus si c'est un instinct ou ta propre personnalité renfermée qui laisse cet arrière-goût. Alors tu erres, seule, solitaire. Ne laissant aucune place aux autres parce qu'il n'y a guère de raison. De s'attacher à ces visages éphémères. Tentant de survivre sans te mêler à ceux qui t'entoure. Qui aimerait ce caractère après tout. Et tu n'en as cure de te savoir seule. De te savoir isolée. Un peu comme l'oublié que l'on laisse errer au fond de la salle. Rien a réellement changer entre Zarina et Murk.
Toujours le même rejet des semblables.
Toujours la même errance solitaire.
Toujours la même guerre.
Bonjour, je suis un truc et un machin informe qui arrive à respirer et qui écrit depuis bien trop longtemps sur les forums rp.
C'est à peu près tout ce que j'ai à dire.
Ah si pour le pouvoir, je ne sais pas si c'est assez de contre-partie ou si c'est assez clair, du coup n'hésitez pas à me donner votre avis